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Caractérisation des contextes socio-économiques et environnementaux de sept villages des Groupements Totuku et Yangandi dans le Secteur de Yalikandja-Yanonge, Province de la Tshopo, en République Démocratique du Congo

Lucas C., Peroches Adrien, Dubiez Emilien, Bisimwa Benjamin, Lescuyer Guillaume. 2021. Caractérisation des contextes socio-économiques et environnementaux de sept villages des Groupements Totuku et Yangandi dans le Secteur de Yalikandja-Yanonge, Province de la Tshopo, en République Démocratique du Congo. Montpellier : CIRAD, 50 p.

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Résumé : Le projet " PROmouvoir et Formaliser l'Exploitation Artisanale du bois d'oeuvre en Afrique Centrale " (PROFEAAC) a pour but de participer à la gestion durable de l'exploitation artisanale de bois d'oeuvre par l'appui à la légalisation des scieurs artisanaux ainsi qu'à la restauration forestière. Avant la mise en place, de manière participative, de mesures de restauration forestière, un diagnostic de terrain a été conduit dans la zone d'étude. Ainsi, le présent rapport présente les résultats du diagnostic des facteurs socio-économiques et environnementaux pouvant influencer positivement ou négativement les pratiques de restauration forestière. Le diagnostic a été conduit en République Démocratique du Congo, dans la Province de la Tshopo, dans le Territoire d'Isangi et, en particulier, dans les Groupements de Totuku et Yangandi situés dans le Secteur de Yalikandja-Yanonge. Le travail de terrain a été conduit dans sept villages et a permis de décrire (i) les éléments d'occupation des sols constituant le paysage, (ii) les droits d'accès et d'usages des différentes ressources naturelles, (iii) les activités économiques pratiquées, (iv) les dynamiques agraires et les pratiques agricoles, (v) les pratiques de restauration forestières existantes et finalement (vi) de discuter des options de restauration les plus adaptées à mettre en oeuvre. Sur les sept villages concernés par l'étude, trois sont situés entre 5 et 15 km de la cité de Yanonge sur l'axe Yanonge – Yatolema (Yakamba, Yangandi et Yaosenge) dans le nord du Secteur alors que quatre villages (Yakoundi, Yelimbo, Bolongo 2 et Yaolonga) sont situés de 5 à 10 km sur un axe perpendiculaire menant à Yatolema, dans le sud du Secteur. Dans ces villages, le paysage est caractérisé principalement par les champs cultivés (Ikane), les jeunes jachères (Fufuke), les vielles jachères (Sukulakoko), les plantations de palmier (Ngazi) et la forêt " vierge " (Ngonda). Le Ngonda est plus ou moins présent dans les villages suivant le niveau de pression exercée sur la ressource liée à l'ouverture des champs par abattis-brûlis. La forêt est plus présente dans les villages du sud du Secteur (Yakoundi, Yelimbo, Bolongo 2 et Yaolonga) que dans les villages du nord (Yakamba, Yangandi et Yaosenge). Sur les 7 villages étudiés, ce sont 1 367 ménages qui ont été recensés soit une population estimée à 8 200 personnes. La plupart des ménages ont pour principale activité l'agriculture. Cependant, des activités secondaires contribuent également à générer des revenus complémentaires aux ménages (cueillette, chasse, vin de palme, etc.). Les principaux revenus des ménages proviennent des cultures de maïs et de riz et de la production d'huile de palme. L'exploitation artisanale de bois d'oeuvre n'est pas une activité très répandue. Quelques exploitants sont présents et exploitent artisanalement des arbres pour la production de sciages. Ces derniers sont, pour la plupart, vendus localement à des menuisiers. En ce qui concerne cette activité, les droits d'accès et d'usages diffèrent suivant le niveau de dégradation forestière des villages étudiés. Dans les espaces appropriés individuellement (champs, jachères), le droit d'exploitation appartient au chef de ménage. En forêt, ces droits diffèrent suivant les villages. L'accès est commun à l'ensemble des lignées dans les villages de Yakondi et Yangandi. Il est approprié au niveau des lignages dans les villages de Yelimbo, Bolongo 2 et Yaolonga et individualisé au niveau des ménages dans les villages de Yaosenge et Yakamba. . Ainsi, plus la ressource forestière est rare, plus les droits s'individualisent. Au sein de l'ensemble des villages étudiés, l'amélioration des pratiques agricoles (cultures vivrières et huile de palme) est considérée comme la principale possibilité d'accroître le bien-être des populations au cours de la prochaine décennie. Dans les villages du sud du Secteur, l'exploitation artisanale des arbres pour la production de sciages est également priorisée. La présence de nombreux arbres à une relative proximité de ces villages explique probablement ce choix collectif bien que cette activité semble aujourd'hui dormante en raison d'une évacuation difficile et couteuse des sciages vers Kisangani. Trois principaux systèmes de culture ont été rencontrés dans la zone d'étude. Il s'agit de i) la culture, sur abattis-brûlis, du manioc associé à des cultures à cycle court (généralement le maïs et/ou le riz et également le niébé ou l'arachide), ii) la culture du palmier à huile et iii) le jardin de case. Les cacaoyères sont quasi-inexistantes. Dans ces trois systèmes, les cultures sont conduites avec un outillage manuel (hache, machette, houe) et sans intrants extérieurs. Le recours à la main d'oeuvre extérieure est présent mais reste minoritaire et la majorité des travaux agricoles n'entrent pas dans un système monétarisé. Le travail est dominé par la main d'oeuvre familiale et par l'existence de groupes de travail collaboratif, appelé Likelemba. Au sein de ces trois systèmes culturaux, on constate peu de pratiques de restauration forestière. En effet, l'appropriation foncière passant par la défriche et l'absence de valorisation des arbres abattus n'incitent pas les agriculteurs à conserver les arbres et encore moins à en replanter. Ils sont plus perçus, Projet PROFEAAC – Composante 2 Contextualisation socio-économique et environnementale des villages des Groupements Totuku et Yangandi, Secteur de Yalikandja-Yanonge, Province de la Tshopo 3 comme une contrainte que comme un avantage. Des agriculteurs conservent néanmoins quelques arbres dans leurs champs en raison de la difficulté d'en abattre certains mais également en raison des produits que certains peuvent fournir (chenilles, médicaments traditionnels, sciages, etc.). Une typologie des ménages basée sur la nature, les modalités d'organisation et de combinaison des moyens de production dans le système productif a été établie. Les villages situés dans le nord et le sud du Secteur se différencient par des ménages qui ont des facteurs de production différents (notamment lié à la possibilité d'accéder à la forêt pour l'ouverture de nouveaux champs.). Cela se caractérise notamment par une présence plus marquée des palmeraies denses au nord du Secteur. Néanmoins, ces villages s'inscrivent dans une dynamique agraire régionale similaire. Dans les villages du sud, trois types de ménages ont été différenciés en fonction principalement de leur capital foncier. Il s'agit des grands ayants droit, des moyens ayants droit en expansion et des jeunes ayants droit en expansion. Dans les villages du nord, cinq types de ménages ont été établis. Ces villages se caractérisent par une plus forte pression historique sur la ressource forestière et la privatisation complète des terres dans un rayon de 5 à 6 km du village. Les échanges monétaires sont également plus développés, notamment pour les travaux aux champs. Les cinq types d'ayant droit identifiés sont les grands ayants droit, les moyens ayants droit en expansion, les jeunes ayants droit, les jeunes hors du territoire et les allochtones. Ces derniers se retrouvent principalement dans le village de Yaosenge où se trouvent les anciens employés de la société CELCO qui exploitaient les hévéas par le passé. Sur base de ce diagnostic, des premières mesures de restauration forestière ont été proposées et discutées avec les ménages de la zone d'étude. Il ressort que de nombreux agriculteurs sont dans une phase de défriche de forêt ayant pour but d'augmenter leur capital foncier et ainsi d'assurer l'avenir de leurs enfants en étant en mesure de leur transférer un maximum de parcelles. La priorité n'est donc pas à la restauration forestière mais plutôt à l'exploitation des forêts pour l'ouverture de nouveaux champs. En tenant compte de ce contexte peu propice, quatre stratégies ont été proposées : i) enrichir (notamment avec des fruitiers) les jardins de case ou les champs pour les agriculteurs disposant d'une grande ressource foncière, ii) établir des haies périmétrales autour des champs ou des palmeraies, iii) enrichir les palmeraies et iv) favoriser la pratique de la Régénération Naturelle Assistée. Ces quatre stratégies, présentées lors des restitutions dans les villages, ont présenté un intérêt pour quelques personnes. En termes d'essences, il ressort un intérêt pour trois types d'arbres fruitiers (avocatier, safoutier et mandarinier) et pour des essences locales comme le Bosoho (Petersianthus macrocarpus) en raison de la présence de chenilles comestibles qui peuvent être commercialisées, le Liboyo (Entandrophragma sp.) et le Mogoya (Pericopsis elata) qui sont des essences d'intérêt pour le bois d'oeuvre. Enfin, quelques cultures pérennes comme les caféiers et les cacaoyers ont également été ponctuellement citées. Les perceptions des agriculteurs sur les espèces forestières restent complexes dans un contexte d'exploitation très restreinte et de faible valorisation. Un ancien du village a ainsi posé une question très représentative du mode de pensée actuel " pourquoi devrions-nous planter de nouveaux arbres alors que nous ne valorisons pas les arbres existants ? ". Les pratiques observées au champ dévoilent également un objectif de réduction maximale de la présence des arbres dans les parcelles cultivées. Dans ce contexte difficile, la prochaine mission permettra d'échanger de nouveau sur les propositions de restauration forestière et d'identifier les volontaires souhaitant réintroduire des arbres.

Auteurs et affiliations

Source : Cirad-Agritrop (https://agritrop.cirad.fr/597926/)

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