David-Benz Hélène, Seck Abdoulaye. 2018. Améliorer la qualité de l'oignon au Sénégal. Contractualisation et autres mesures transversales. Rapport d'analyse de politique. Rome : FAO, 77 p.
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Résumé : La production d'oignon a connu au Sénégal une forte progression depuis plus de deux décennies, avec une croissance particulièrement soutenue depuis la mise en place de mesures de protection du marché intérieur, à partir de 2003. Si les estimations officielles de production, qui atteignent 393 255 tonnes en 2016, prêtent à caution, la forte croissance de la production est in contestable. En revanche, la qualité de l'oignon reste très insuffisante. La faible qualité de l'oignon local se traduit par des pertes importantes et une quasi impossibilité de le stocker. De plus, il existe une préférence marquée de nombre de consommateurs pour l'oignon importé, dès lors que ce dernier est présent sur le marché. Par ailleurs, les producteurs font face à un faisceau de contraintes qui les incitent à privilégier le rendement et les récoltes précoces, au détriment de la qualité : absence de financement alors que les charges de production sont élevées, qualité des semences incertaine, manque d'encadrement technique, températures élevée s dès mars - avril dans le Fouta. La faible qualité des bulbes ajoutée aux insuffisances des infrastructures de stockage les contraignent à vendre dès la récolte, induisant un effondrement récurrent des prix durant deux à trois mois. Dans ce contexte, le Ministère du Commerce du Sénégal a formulé une requête auprès de la FAO, afin d'entreprendre, dans le cadre du programme de Suivi et analyse des politiques agricoles et alimentaires (SAPAA), une étude sur des options de contractualisation et de financement pour la commercialisation d'un oignon de qualité. L'étude est le résultat de deux phases d'investigations auprès des acteurs de la filière oignon dans les Niayes et la Vallée du Fleuve Sénégal ainsi qu'à Dakar, et d'un atelier de travail avec un panel d'acteurs de la filière pour affine r les recommandations. La contractualisation, vue comme un schéma d'intégration verticale de la filière, peut constituer une forme d'organisation propice à l'amélioration de la qualité. En effet, la contractualisation permet (i) d'assurer le financement de la production et de faciliter l'accès à des intrants de qualité, (ii) de garantir aux producteurs des débouchés sécurisés à un prix rémunérateur, (iii) d'adopter les pratiques requises pour obtenir un produit de qualité au travers d'un cahier des charges précis, et (iv) de donner accès à de l'appui technique afin de mieux maîtriser les conditions de production et de commercialisation. La présente étude recommande au Ministère d'appuyer un modèle intégral de contrat, qui apparait le plus adapté. Le type de contrat recommandé implique, au - delà des deux principales parties contractantes - groupement d'intérêt économique de producteurs d'une part, grossiste ou importateur d'autre part - , un ensemble d'acteurs d'accompagnement. Le contrat précise le cahier des charges de production, les critères de qualité et les conditions de livraison. Compte tenu de la forte imprévisibilité des prix, il définit, non pas le prix de vente mais une prime à la qualité, le prix de référence étant établi à la livraison, en fonction des prix de marché. Le financement des principales charges de production est assuré par la Caisse Nationale de Crédit Agricole du Sénégal (CNCAS) ou une institution de microfinance (IMF). Il est recommandé que l'Agence de Régulation des Marchés (ARM) accompagne la mise en oeuvre du processus de contractualisation, en assurant en particulier le lien avec les acheteurs, le suivi des marchés, l'appui aux centres de collectes. L'ARM est également en mesure d'assurer les démarches de plaidoyer auprès des institutions concernées afin de mobiliser les ressources nécessaires. De plus, l'étude recommande que l'encadrement agricole assure un accompagnement technique et organisationnel. L'encadrement et la bonification du crédit au producteur, dans le cas d'un financement par une IMF, constituent les principaux coûts pour l'Etat. Les bénéfices attendus proviennent, d'une part, de la rémunération de la qualité et d'autre part, de la possibilité de vendre en dehors des périodes où les prix sont les plus bas, via le stockage. L'analyse coût - bénéfice fait ainsi ressortir un ratio dépenses publiques/valeur ajoutée entre 1,9 et 5,5 selon les hypothèses de calcul. Les modalités de contrat proposées visent à limiter les différents risques de défaillance, mais ne peuvent pas sup primer tout risque. De plus, la mise en oeuvre de tels contrats participe d'un processus itératif et implique un accompagnement suivi au cours de différentes étapes de la contractualisation. De ce fait, les modalités du contrat doivent être ajustées progressivement et conformément à un apprentissage collectif des différentes parties prenantes. Il est donc recommandé de démarrer par une phase pilote, à petite échelle. Cette phase - pilote se limitera pour une première campagne à une dizaine de groupement d'intérêt économique ( GIE ) de bon niveau technique et organisationnel, répartis dans deux bassins de production avec des conditions agro - climatiques favorables à la production d'un oignon de qualité et dont l'accès est relativement aisé : le nord des Niayes et le Bas - Delta. L'échelle pilote permettra de tester la viabilité de cette option et d'apprécier sa reproductibilité. Un changement d'échelle impliquerait que progressivement, une partie ix des coûts d'encadrement soit prise en charge par les organisations paysannes, en investissant une partie de la valeur ajoutée issue des contrats dans le renforcement de leurs capacités d'encadrement. Par ailleurs, d'autres mesures sont à mettre en oeuvre de façon conjointe, tant pour améliorer les chances de succès de la contractualisation que pour permettre une amélioration de la qualité de l'oignon à moyen et long terme, dans des contextes contractuels ou hors contrat. - La capacité des infrastructures de stockage est encore infime par rapport au volume de production (environ 1 pour cent) et la plupart de ces magasins ne sont pas utilisés, du fait d'une conception technique inadaptée et/ou de problèmes de gestion. Des centres de collectes sont en cours de développement, mais leurs modalités de fonctionnement ne sont pas encore bien définies. Avant d'envisager de nouveaux investissements, il apparait urgent de capitaliser sur les expériences antérieures, au niveau national et régional, et de renforcer les capacités des gestionnaires des magasins de stockage et des centres de collecte. - La qualité des semences disponibles, très majoritairement importées, est très irrégulière ; le Violet de Galmi, variété la plus répandue, s'est fortement dégradé. Il importe de revoir le dispositif de contrôle de la qualité des semences à l'importation et de multiplication locale des semences (ce qui implique préalablement un diagnostic précis du secteur semencier). - Le renforcement des capacités techniques et organisationnelles des producteurs d'oignon est un enjeu particulière ment fort, dans la perspective d'une amélioration de la qualité et du développement d'une production sous contrat, via les institutions d'appui (SAED, ANCAR, projets tels de le PADEN) et les organisations professionnelles. - La capacité de pilotage des politiques qui seront mises en oeuvre implique des données chiffrées en qualité et quantité suffisantes. Notamment, le type de contrat proposé nécessite de disposer de données précises et actualisées sur les prix, mais également sur les rendements et la production. De ce fait, les données statistiques sur la production et la commercialisation de l'oignon devraient être encore améliorées pour permettre d'élaborer des politiques plus cohérentes et d'en apprécier l'impact. Afin de financer de telles mesures publiques, différentes sources de financement non-mutuellement exclusives peuvent être envisagées : un prélèvement sur la taxe à l'importation, des prélèvements sur la filière locale au niveau des marchés de gros et des centres de collectes et des contributions des partenaires techniques et financiers.
Mots-clés libres : Oignon, Qualité, Contractualisation, Politique agricole, Sénégal
Classification Agris : F01 - Culture des plantes
E20 - Organisation, administration et gestion des entreprises ou exploitations agricoles
Auteurs et affiliations
- David-Benz Hélène, CIRAD-ES-UMR MOISA (FRA)
- Seck Abdoulaye, UCAD (SEN)
Source : Cirad-Agritrop (https://agritrop.cirad.fr/586655/)
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